lundi 22 avril 2013

La Bulle de fraîcheur parisienne

On pense connaitre sa ville comme sa poche, et pourtant Paris regorge de jolies adresses qui nous sont encore inconnues. Il en était ainsi du restaurant La Bulle, ouvert depuis quelques années par Cécile et Benjamin, un couple charmant qui reçoit ses clients avec chaleur et attention. Aux abords du canal Saint-Martin, ce néo-bistrot à la déco sobre et efficace est baigné de lumière la journée, entouré de baies vitrées, et tamisé le soir par des lampes design choisies avec soin. Dans une ambiance bleutée, on s'installe tranquillement pour déjeuner, goûter ou diner, tout en laissant le temps hors de portée.


Le chef Alberto Rebolledo, récemment arrivé en cuisine, prépare de jolies assiettes originales et savoureuses. On pourra ainsi découvrir une Poêlée de chipirons, beurre d’herbes et copeaux jambon ibérico absolument incroyable, un Tartare de dorade à la clémentine, mousse au citron et biscuit au parmesan, un Œuf mollet sur tarte à l’oignon et nid de salade ou encore des Tagliatelles de seiche au chorizo, crème carotte-orange. Côté plats, un Pavé de cabillaud, viennoise de citron, tombée de poireaux, couteaux et sauce blanche et une Caille rôtie sur l'os, cuisses confites, compotée de lentilles au balsamique et betteraves au four nous confortent dans notre première impression : la cuisine de La Bulle reste simple et est pourtant surprenante de créativité et de fraîcheur pour le plaisir de nos papilles. Les desserts viennent parfaire le repas : Éclair revisité café marron, Ananas confit aux fruits exotiques, crumble et mousse coco, tendre et doux, et Tube croustillant au chocolat (Guanaja 70 %) terriblement gourmand.

La carte des vins n'en est pas moins impressionnante, avec plus de soixante références que l'on sent sélectionnées avec passion par le propriétaire. Nous avons ainsi testé un Faugères blanc cuvée Conviction 2011, Château Chenaie (E. Chabbert) et un Bourgogne blanc Saint-Véran 2011, Cave de Chaintré. Et pour finir en beauté, un digestif de choix, un Calvados du pays d’Auges signé Louis Dupont.

Les prix sont doux, la carte varie régulièrement selon les saisons et se crée chaque jour en fonction des produits frais trouvés. Une agréable et grande terrasse aux couleurs anis et gris vous accueille pour les beaux jours à venir. Beaucoup de charme et de plaisir rencontrés, donc, qui ne peuvent que nous donner envie d'y retourner : La Bulle deviendrait assurément notre cantine si nous habitions le quartier.


La Bulle, 48 rue Louis Blanc, Paris Xe 

dimanche 14 avril 2013

Le Gers et les petits gratins foie gras et cèpes


Nouveau passage dans le Gers, des vins doux naturels Maury et Rivesaltes Grenat du Languedoc et des bouchées indiennes poulet et crevettes pour l'apéritif, d'incroyables fromages du marché de Fleurance de la fromagerie des Sables Fauves (tommes du Gers à l’ail des Ours, à l’Italienne, et à l’ortie, et vieux brebis), la découverte des vins du Domaine d'Embidoure (notamment la Cuvée des Filles d’Embidoure), un autre vin du sus-ouest très apprécié, un Pécharmant Cuvée Collection 2009 du Domaine de l'Ancienne Cure Sélection, et des conserves de la Maison Escourrou (cou farci, cassoulets, gésiers, pâtés, fritons, confits de canard…), de la pluie, beaucoup de pluie, et ainsi de magnifiques ciels orageux et lumineux, de longs et joyeux repas en excellente compagnie, à manger entre autres ces délicieux gratins de pommes de terre et foie gras préparés par ma cousine Aurélie. J'ai tenté ici de refaire sa recette "à ma sauce", en ajoutant les superbes cèpes séchés généreusement offerts par mon amie Juliette et cueillis en Lozère par son frère. Je me devais de les utiliser dans un plat où leur goût serait aussi présent et mis en valeur que la merveilleuse odeur dont ils ont embaumé ma cuisine. J'ai aussi donné un petit goût d'ailleurs à cette recette avec l'utilisation du poivre de Setchuan Cîmes du Vietnam de l'épicerie de Bruno et de la coriandre.


Pour trois petits gratins de cèpes et de foie gras
400g de pommes de terre rattes du touquet / 100g de cèpes / 50g de foie gras/ 2 tartines de pain de campagne / 2 tranches de jambon (facultatif) / 100g de gruyère râpé / 2 oignons doux / 10cl de lait / 20cl de crème fraiche entière épaisse / un peu de beurre / 1 gousse d'ail  / poivre de Setchuan / fleur de sel / coriandre (ou autre herbe type persil, ciboulette, aneth…)
Frotter des moules individuels (environ 12 cm de diamètre et surtout profonds) avec la gousse d'ail, puis les beurrer. Faire une première couche de pommes de terre, une deuxième de gruyère, effriter du poivre de sichuan. Terminer par quelques morceaux de foie gras. Répéter l'opération en remplaçant le foie gras par les cèpes (s'ils sont séchés, les faire bouillir au préalable une dizaine de minutes dans une casserole d'eau chaude salée). Ciseler quelques brin de coriandre. Renouveler une dernière fois l'opération avec cette fois-ci une couche de pommes de terre, une couche d'oignons doux, une de gruyère, poivrer, une couche de morceaux de foie gras et terminer par une couche de pommes de terre. Saler. Recouvrir chaque préparation d'un mélange de crème épaisse et de lait. Faire chauffer au moins 40 minutes au four préchauffé à  180°-190° selon votre four.


mardi 9 avril 2013

Bones, le gastro punk-rock de l'est parisien





J'ai testé maintes fois l'apéro chez Bones. J'aime l'atmosphère qui se dégage de ce lieu, brute, simple et nature, tellement atypique qu'il pourrait se trouver à Berlin, New York ou Montréal tant l'on est loin des clichés parisiens. Mi-industriel mi-nordique, la déco tranche par sa simplicité, mêlant béton et marbre avec élégance, la lumière est tamisée, le ton est donné. Les serveurs sont nombreux, jeunes et souriants, à l'instar du chef australien James Henry qui a ouvert cette enseigne mi-janvier et œuvre en cuisines, après avoir officié au Spring puis au Passage.







La cuisine de James est à l'image du lieu. Le restaurant joue sur la simplicité des ingrédients sublimée, afin de créer des plats aux saveurs subtiles. Le menu est unique, déstructuré, entre amuse-bouches, entrées, plats, dessert, mignardise. Un repas qui s'étale dans le temps, que l'on finit par oublier tant le plaisir prend le dessus. Pas de routine, la cuisine varie au rythme des saisons et de l'humeur du chef, tout en restant originale et décalée. La surprise s'installe à la table, l'on voit défiler des mets inhabituels aux découpes et cuissons parfaites, emplis d'amour et de passion. Nous sommes nombreux, chacun arrive au compte goutte, le diner s'annonce quelque peu décousu, et pourtant, nous nous sentons à l'aise, on est loin des endroits guindés et des serveurs agacés, nous sommes au contraire aux petits soins.

Après un premier verre de Jura blanc, nous goûtons un vin italien dit "orange", Dinavolino (Emilie-Romagne), très surprenant, tannique et puissant à la robe légèrement trouble, pour accompagner une assiette de saucisson de porc et de magret de canard séché dans la cave du restaurant et fumé, faits maison tout comme le pain au levain et le beurre de baratte. Un régal. Arrivent ensuite de petites huîtres cuites façon barbecue, légèrement chaudes et fumées. Suivies d'un cœur de canard alla gremolata (zeste de citrons, ail et persil), incroyablement tendre. Manger ce type d'abats dans un restaurant est pour moi une première. J'aime, que dis-je j'adore, et mes compagnons de table aussi. Une nouvelle bouchée apparait : foie gras et oursin en bouillon de cochon de lait, c'est moelleux et détonnant en bouche. On se délecte d'un rouge du château Fond Cyprès, La Syrah de la Pinède de 2011, la pause est nécessaire, avant de ré-attaquer sur un tartare de veau, encre de seiche, poutargue et chips de vitelotte, puis une seiche, sésame et carottes multicolores, et enfin un lieu jaune, tourteau, riz carnaroli et légumes croquants… et non, ce n'est pas fini. Les fromages… vieux comté, cantal à extrême maturation, jauni par le temps, fromage à pâte persillée… joie. L'on reprend une gorgée de vin pour adoucir le palais, et terminer en douceur avec une glace à l'amande tendrement lovée dans une mousse crémeuse au chocolat, explosion de meringue et caramel. Avec les cafés et la prune, de petites madeleines délicieusement tièdes et épicées viennent clore ce repas déroutant et magique. Nous n'avons pas vu le temps filer, les conversations vont bon train, il est malheureusement temps de rentrer.


En dehors du restaurant, Bones propose une "cave à manger" que j'ai plusieurs fois eu l'occasion de découvrir : un premier apéritif au comptoir, un verre de vin blanc Côte du Jura BB1 Les Chais du Vieux Bourg accompagné de belons, lesquels côtoient des huîtres fraîchement écaillées fines de claires ou roumegous. Un deuxième, calés sur les banquettes en bois, on ne perd pas ses habitudes et nous reprenons un verre de Jura et une assiette de belons, puis une bouteille de Clos des Grillons cuvée Le Pic Gris. La faim se fait sentir et nous passons à l'acte. Regarder avec envie le cochon de lait qui trône sur le bar est une chose, le déguster en est une autre. Le sandwich au cochon de lait se présente sous forme de burger avec une salade de choux et une petite sauce type béarnaise, et est tendre et goûtu à souhait. Nous avons également testé les cailles rôties au yaourt grec, délicieuses, originales et citronnées. Certes, ce n'est pas du plus pratique à manger debout au comptoir, mais la maison ne fait pas dans le "facile", et ces assiettes sont si inattendues à la carte, que j'y retournerai spécialement, pour le tourteau mayonnaise au curry, par exemple. Le tout accompagné de verres de rouge Grenache Corbières. Pour finir sur deux whiskies, l'un tourbé, l'autre japonais… Un troisième apéritif, carpaccio de mulet noir, Cherverny et saucisson Kintoa… et sûrement beaucoup d'autres tant l'adresse me séduit.







Il faut tout de même savoir plusieurs choses avant de pousser la porte de Bones : l'ambiance est chaleureuse et vivante, décontractée, et le brouhaha, de fait, est constant. La salle est divisée en deux parties, le comptoir pour l'apéro, et la salle pour le diner. Ceux qui sont sensibles au bruit et à la musique trop forte, passez votre chemin. On est ici dans un restaurant néo-gastro qui flirte avec l'univers des bars les plus rocks de la capitale. Il est ensuite préférable d'aimer les produits de la mer, qui sont la spécialité de la maison, surtout si vous décidez d'y diner (pour l'apéro le choix est large et chacun y trouvera son compte). Il n'est rien de tel que de partager le plaisir de déguster des huîtres et autre tourteau en bonne compagnie, les amateurs me comprendront. Concernant la carte du restaurant, elle est unique, changeante au gré du marché et des saisons, et le choix n'est pas de mise… il faut donc aimer se laisser guider et surprendre, être curieux et surtout ne pas être difficile. J'ai longtemps hésité à parler de cette adresse que j'affectionne tout particulièrement de crainte de voir tout Paris y affluer, mais la toile et le bouche à oreilles ont déjà sévi, et l'endroit est souvent plein à craquer. Cependant, selon les critères que j'ai énumérés ci-dessus, la sélection de la clientèle se fait finalement naturellement. Vous l'aurez compris, Bones est une adresse pour les adeptes du bon vivre, les amoureux des mets fins et recherchés, les épicuriens détachés de tout préjugés. On vient y chercher une cuisine talentueuse sans prétention, "sobrement sophistiquée" et audacieuse, nous écartant quelques temps des sentiers battus. Car la signature des plats de James Henry pourrait se résumer à ce mot : décalé.



Bones, 43 rue Godefroy-Cavaignac Paris XIe (uniquement le soir)





mercredi 3 avril 2013

Le Café Pouchkine, Moscou-Paris

J'ai récemment pris mon petit déjeuner au Café Pouchkine, situé au rez-de-chaussée du Printemps Haussmann Mode. Institution russe de la Maison Dellos, Pouchkine a ouvert ses portes à Paris il y a trois ans. La boutique est superbe, le décor d'inspiration russe du XVIIIe siècle est luxueux et raffiné. On y trouve un grand nombre de pâtisseries originales et plus belles les unes que les autres, généreuses pour des portions individuelles (créations du chef pâtissier Emmanuel Ryon), mais aussi un grand choix de gâteaux, la maison mettant l'accent sur la création de pièces montées personnalisées. 



Il était tôt et je n'ai, de fait, pas eu l'opportunité de goûter les pâtisseries - plus appropriées pour l'heure du quatre-heures. J'ai en revanche testé plusieurs viennoiseries : un pain au chocolat gonflé et doré à souhait, dont la particularité est la crème pâtissière au chocolat Or Noir et de pépites de chocolat enrobée de pâte feuilletée. Aérien et généreusement fourni en chocolat, il n'est ni trop sucré ni trop beurré. Sur le comptoir également se trouvait un gâteau nommé Bostock aux myrtilles, brioche au lait d'amandes garnie d'une crème d'amande et de myrtilles. L'ensemble est dense, sec et moelleux à la fois. J'ai dégusté une troisième viennoiserie nommée la Vatrouchka, pâte feuilletée garnie d'une crème légèrement citronnée à base de Tvorog (fromage blanc russe). Intéressant également, la crème citronnée est onctueuse et parfaitement dosée entre sucre et fromage.


Le must de ce petit déjeuner reste pour moi le chocolat chaud, exceptionnel par son goût et sa texture onctueuse, servi dans une superbe chocolatière d'époque. Le Café Pouchkine propose également des spécialités russes salées, les Pirojkis, petits chaussons fourrés (champignons, légumes, bœuf, choux, Foie gras de canard, pommes de terre parfumées aux truffes), des boissons fraîches appelées Morse réalisées à base d'une infusion de fruits rouges (baies rouges, cerise ou cassis), le Borchtch (soupe traditionnelle russe à base de choux et de betteraves, servie avec des lamelles de bœuf mariné, des pommes de terre et de la crème fraiche), le fameux Bœuf Strogonoff aux champignons à la crème fraîche accompagné de Pirojkis… à tester la prochaine fois pour ma part, car je suis avant tout très friande de salé. Le lieu n'est pas grand et les places au comptoir sont chères. Pour les beaux jours, une grande terrasse permet également de déguster sur place, autrement il vous reste la possibilité de prendre à emporter, en attendant l'ouverture prochaine d'un nouveau salon de thé Pouchkine à part entière.


Café Pouchkine, 64 bvd Haussmann (rez-de-chaussée du Printemps) Paris IXe